Lorsque
débute l'année
1940,
la situation militaire n'a guère
évolué depuis
la déclaration de guerre
anglo-française à
l'Allemagne,
du dimanche 3
septembre 1939. La Pologne,
envahie aux premières
heures du vendredi 1er
septembre 1939, a succombé
depuis longtemps déjà
et le front Ouest s'est peu
à peu endormi. Désormais,
le Status quo règne.
Ainsi,
après une courte période
de tension, l'absence de
confrontation directe à
grande échelle entre
les combattants a laissé
place à une période troublante
que l'Histoire va qualifier
de "Sitzkrieg"
(guerre
assise) en Allemagne
; de "Phoney
War" (guerre
truquée) en Grande-Bretagne
et de "Drôle
de guerre" en France.
Toutefois,
hormis quelques escarmouches
terrestres, des combats se déroulent
bel et bien dans les airs, à
l'occasion notamment de sorties
sur ou à proximité
de la frontière allemande.
Inévitablement, ces "accrochages"
prélèvent leur
lot de victimes dans les rangs
des aviations des deux camps.
Mais
la vie des unités aériennes
est également quotidiennement
rythmée par
les vols d'entraînements, les
exercices de tirs et de bombardements
qui tous, visent à parfaire
l'instruction des équipages,
leur maîtrise des appareils
ou leur connaissance de la topographie
des secteurs survolés. Et là
encore, ces exercices donnent
lieu à leur cortège
de drames humains.
Petit
à petit cependant, l'hiver approchant,
les conditions météorologiques
se dégradent, restreignant ainsi
fortement toute activité
aérienne quant elles
ne l'interdisent pas tout bonnement
!
En France,
les fêtes de Noël
et du Nouvel
An se passent sous la
neige, des conditions climatiques
particulièrement rudes pour
les équipages et personnels
tant britanniques que français
logés chez l'habitant, mais
plus encore pour les appareils
qui, sur leur petit terrain
de campagne, ne disposent d'aucune
infrastructure digne de ce nom
susceptibles de les abriter
!
Néanmoins,
l'évolution de la météo permet
parfois aux pilotes de prendre
l'air afin de maintenir le potentiel
opérationnel de leurs unités
respectives. Et c'est
dans ce contexte particulièrement
difficile qu'en ce mardi
23 janvier
1940, va se dérouler
le vol du Battle
K9329 attribué
au No. 218
Gold Coast Squadron.
Né
de la Première
guerre mondiale, le No.
218 Squadron
est formé le
24 avril
1918 à Douvres,
dans le Kent
avant de se voir transféré
en France
environ un mois après
sa création. Unité
de bombardement diurne il rejoint
alors le No. 5
Group et le secteur de
Douvres-Dunkerque
relevant du Naval
Command. En cinq mois
d'opérations, le Squadron
participe à 117 raids menés
aussi bien sur la Belgique
que la France,
larguant par là même occasion
94 tonnes de bombes et revendiquant
la destruction en combats aériens
de 38 appareils adverses ! Ses
glorieux faits d'armes ne lui
évitent pourtant pas d'être
dissoud dès 1919.
Cependant, l'année 1936
voit sa reformation intervenir
sur le terrain de Boscombe
Down qu'il quitte dès
le
samedi 2
septembre 1939, au
lendemain même de l'invasion
de la Pologne,
pour venir s'installer
en France
sur le terrain d'Aubérive-sur-Suippes,
dans le département de
la Marne.
Le No. 218
Sqn. est alors équipé
de bombardiers légers
Fairey
Battle Mk I et
dépend de l'Advanced
Air Striking Force.
En
ce mardi
23 janvier
1940 sur le terrain d'Aubérive
donc,
le Flying
Officer I. G. Richmond
prend, semble-t-il seul, les
commandes du Fairey
Battle
K9329.
Le décollage s'effectue sans
difficulté majeure et le vol
ne fait l'objet d'aucun incident
particulier. Toutefois, c'est
à l'atterrissage que
les choses tournent mal. A l'issu
de sa séance d'entraînement,
tandis que le F/O
Richmond se dispose à
atterrir le plus naturellement
du monde sur son terrain d'Aubérive-sur-Suippes,
il est alors victime de la défaillance
technique de ses Flaps
(ses volets).
Dès
lors incapable de réduire
la vitesse de son appareil,
il ne peut éviter la
collision au sol avec le Battle
K9327 parqué non
loin de là. Les deux appareils
sont endommagés et le F/O
Richmond sort blessé
de cette mésaventure. Bien que
le K9329
ne soit pas à proprement parlé
détruit, on peut d'ors et déjà
le comptabiliser comme définitivement
perdu pour la Royal
Air Force puisqu'au vendredi
10 mai
1940, date du déclenchement
de l'offensive allemande à
l'Ouest, soit quand même
près de quatre mois après cet
accident, l'appareil ne sera
toujours pas réparé
! Pire que tout, ce dernier
devra même
être abandonné sur place lors
de l'évacuation d'Aubérive-sur-Suippes
par le No. 218
Squadron...
De
fait, si ce Battle
est le second a être perdu
par le No. 218
Sqn. sur le département
de la Marne,
il a également le douteux
privilège d'être
la première perte d'un
bombardier britannique à
survenir sur ce même sol
pour l'année 1940.
[
à propos
de la précédente
perte du No. 218 Sqn., le lecteur
pourra se reporter à
l'historique du Battle
K9356
]
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